Un marché locatif qui se resserre

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cgelinas
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28 octobre 2023


En juin 2022, la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) avait démontré que le Canada se dirigeait vers un déficit de 3,5 millions de logements pour 2030, dont 620 000 au Québec. Mais en septembre 2023, la révision des données nous annonce que la province en aurait plutôt besoin de 860 000!

Cet écart sera deux fois et demie supérieur à la hausse prévue du stock de logements québécois, qui n’augmentera que de 330 000. En d’autres termes, pour suffire à la demande, le Québec devrait construire 1,2 million de logements de tous types − maisons unifamiliales ou jumelées, logements dans une copropriété, appartements locatifs standard ou social − d’ici 2030.

L’économiste en chef adjoint de la SCHL, Aled ab Iorwerth, explique que ces données sont basées sur une série d’hypothèses (démographie et flux migratoires, taux d’intérêt, croissance du revenu, activité économique). « Les Britanniques ont démontré qu’on sous-évalue presque toujours la demande réelle de logements si on se borne à la prévoir sur la base du nombre de ménages. »

La réalité peut cependant diverger des hypothèses, convient-il. C’est justement pourquoi la SCHL a raffiné ses prédictions selon deux scénarios : faible croissance économique ou forte croissance démographique. Dans le premier cas, la pression diminue légèrement : il ne manquerait alors que 770 000 logements au lieu de 860 000. Inversement, si d’importants flux migratoires augmentent la population, la pénurie québécoise se chiffrerait plutôt à 1,1 million de logements par rapport au stock disponible.

Les plus récents chiffres émis par l’Association canadienne de l’immobilier (ACI), qui s’intéresse strictement au marché de la propriété, vont dans le même sens. Shaun Cathcart, économiste principal à l’ACI, constate que les hausses de taux d’intérêt des 18 derniers mois ont complètement aplati le marché. « Et si les taux d’intérêt tardent à redescendre à leur niveau pré-COVID, prédit-il, le redécollage sera plutôt lent. »

Nouveaux indicateurs

Depuis deux ans, la SCHL a modifié son approche quant au marché locatif, qui représente presque 40 % du marché québécois, contre moins de 30 % dans les autres provinces, selon les données de la Société d’habitation du Québec. « Depuis que nous l’examinons sous l’angle de l’abordabilité, nous découvrons plein de choses », explique Aled ab Iorwerth.

Deux nouveaux indicateurs, présentés pour la première fois en juin dernier, confirment les plaintes des associations de locataires quant au resserrement du marché.

Le premier indicateur concerne la part de logements abordables. Ce calcul est fait sur la base d’un prix qui correspond à 30 % du revenu pour le quintile des ménages les moins nantis.

Cet indicateur montre que le Québec fait bande à part. En Ontario, la part du marché qui est abordable pour les ménages à faible revenu est quasi nulle presque partout. À Vancouver, cela correspond à 1 %. Edmonton se démarque à hauteur de 13 %. Québec et Montréal, elles, trônent à 25 % et 23 % respectivement. « On ne se l’explique pas bien », admet Aled ab Iorwerth, selon qui cette statistique illustre tout simplement le fait qu’il y a plus de logements locatifs sur ces deux marchés. « La situation n’est pas forcément la même en région. » En effet, la part de logements abordables à Gatineau tombe à 8 %.

Un second indicateur illustre par ailleurs la pression haussière sur les loyers. Cet indicateur compare les loyers moyens des nouveaux locataires par rapport aux logements occupés depuis plus d’un an. Il cherche à mesurer si les propriétaires profitent du roulement des locataires pour ajuster le prix selon sa valeur au marché, en y ajoutant les coûts de rénovation et de réparation.

C’est bien le cas pour les grandes villes qui ont été considérées : l’écart est d’environ 500 $ à Toronto et Vancouver et de 250 $ à Montréal, alors qu’à Edmonton et Calgary, cet écart n’est que de 27 $ et 88 $ respectivement.

« On n’est pas fixé sur la cause, mais le facteur qui jouerait ici, c’est l’intensité de la réglementation en urbanisme qui crée de la rareté dans la construction d’immeubles locatifs », explique l’économiste. « À Edmonton, les permis sont vite accordés, alors il s’y construit plus d’immeubles locatifs plus vite. Ce fut longtemps l’avantage de Montréal par rapport aux deux autres métropoles, mais cet avantage s’estompe parce que la réglementation municipale y devient plus sévère. »

Construire plus

Shaun Cathcart, économiste à l’ACI, est formel. « Actuellement, l’offre ne suit pas la demande et ne pourra pas non plus la rattraper, dit-il. Pour rétablir un équilibre, il faudra un plan pour construire comme on n’a jamais construit. »

Construire quoi ? « Le logement social, il en faut plus. Mais même si on le doublait, ce qui serait déjà énorme, ça ne réglerait qu’une partie du problème, dit Aled ab Iorwerth. Ça va prendre plus d’habitations de tous types. Mais ça va aussi prendre plus de permis plus vite, et plus de technologie en construction. »

Selon lui, il est plus que temps que le secteur de la construction s’attaque à son manque de productivité. « Toutes les études le montrent : ce secteur est notoirement improductif. À l’échelle du continent, rien ne s’améliore. »

Les gouvernements devront cependant accoucher de meilleures politiques d’habitation mieux coordonnées entre les divers paliers, soutient-il. « Le Québec commence à généraliser la pratique torontoise de refiler les frais de développement des infrastructures aux promoteurs immobiliers. À Toronto, ça ajoute 100 000 $ par logement. Ça ne favorise pas l’abordabilité. »



Source: MSN / Le Devoir



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Claude Gélinas, Éditeur
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