Certains dénoncent une mesure eugénique et affirment que le pays n'en fait pas assez en matière de prévention et de traitement des addictions.
Au Canada, la loi sur l'aide médicale à mourir, entrée en vigueur en 2016, sera élargie dès mars prochain [2024] aux patients souffrant de maladies mentales. Cela inclurait certaines personnes toxicomanes, qui pourraient donc avoir accès à l'euthanasie, explique Vice.
À l'heure actuelle, une personne peut demander l'aide médicale à mourir (MAID) si elle souffre d'un «état pathologique grave et irrémédiable», tel qu'une maladie ou un handicap grave, l'ayant placée dans un état avancé de déclin irréversible et lui ayant causé des souffrances physiques ou psychologiques durables –à l'exclusion des maladies mentales. Avant d'aller jusqu'au bout du dispositif, elle doit également faire l'objet de deux évaluations de la part de prestataires de soins de santé indépendants.
La possibilité de permettre aux toxicomanes d'accéder au dispositif est discutée cette semaine lors d'une conférence de médecine sur les addictions, organisée à Victoria, en Colombie-Britannique. «Je ne pense pas qu'il soit juste, et le gouvernement ne le pense pas non plus, d'exclure des personnes du dispositif parce que leurs troubles médicaux ou leurs souffrances sont liés à une maladie mentale», déclare David Martell, médecin spécialisé dans les addictions.
Ce dernier, qui accompagne des patients dans leur suicide assisté depuis sa légalisation en 2016, ajoute: «Il n'est pas non plus juste d'exclure des personnes uniquement parce que leurs troubles mentaux sont dus, en partie ou en totalité, à la prise de substances psychoactives: il faut traiter tous les patients de la même manière.»
Pourtant, la mesure semble en contrarier plus d'un: «La MAID, dans le domaine de la santé mentale et de la toxicomanie, vise à l'eugénisme. Ce n'est pas la solution: il y a des gens qui luttent contre la toxicomanie et qui n'obtiennent pas le soutien et l'aide dont ils ont besoin», dénonce Zoë Dodd, engagée auprès des personnes souffrant d'addictions.
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David Martell reconnaît que les options de soins pour les personnes souffrant d'addictions sont sous-financées. Il confie aussi que, pour le moment, aucun de ses patients toxicomanes n'a évoqué le souhait d'une mort assistée. Pourtant, il pense que cette conférence est l'occasion d'attirer l'attention du public et des politiques sur ce fléau.
«Un désir raisonné de mourir»
Pour prétendre à une MAID, la personne dépendante devra au préalable prouver qu'elle a suivi un traitement pour tenter de s'en sortir, et indiquer sa forme et sa durée. «En plus de souffrir d'un trouble mental qui dure depuis très longtemps et nuit considérablement à leur fonctionnement, les patients doivent avoir essayé des traitements, fondés sur des données probantes», explique David Martell.
Source: Slate
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