Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre entendra au moins deux ministres, des fonctionnaires du renseignement, des membres d’Élections Canada et d’ex-conseillers du premier ministre Justin Trudeau pour faire la lumière sur les informations voulant que la Chine ait tenté à plusieurs reprises de s’ingérer dans les élections fédérales au pays.
Préoccupés par les informations publiées par la chaîne Global News concernant des manœuvres d’infiltration du milieu politique canadien et de déstabilisation de la démocratie par la Chine, notamment en s’ingérant dans les deux dernières élections fédérales, les membres conservateurs du comité ont déposé lundi une motion afin de se pencher sur cette affaire.
Dans la motion, adoptée avec le soutien des membres du NPD et du Bloc québécois, les députés réclament de prolonger d’au moins quatre séances les travaux du Comité à ce sujet. Des représentants du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), d’Élections Canada et du groupe de travail sur les menaces de sécurité et de renseignement visant les élections font partie des gens que les députés désirent questionner.
Le comité veut aussi entendre le ministre des Affaires intergouvernementales, de l’Infrastructure et des Collectivités, Dominic LeBlanc, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, ainsi que la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre, Jody Thomas.
D'anciens conseillers de Justin Trudeau à la sécurité nationale, David Morrison et Dan Stanton, sont aussi sur la liste de témoins contenue dans la motion, tout comme l’ancien ambassadeur du Canada en Chine David Mulroney.
Selon les députés conservateurs Michael Cooper et Luc Berthold, qui ont présenté et défendu la motion, l’existence de ces efforts de déstabilisation politique menés par la Chine mérite qu’on aille au fond des choses. Ces manoeuvres comprendraient des tentatives de corruption de fonctionnaires, de l’intimidation et des tentatives de manipulation d’élus canadiens au profit du régime communiste chinois.
Il est question plus spécifiquement de la création d'un réseau clandestin de candidats aux élections de 2019, d'infiltration d'agents dans les bureaux de députés afin d'influencer les politiques, de moyens de pression exercés sur des politiciens ainsi que d'une campagne visant à punir les politiciens canadiens que la Chine considère comme des menaces pour ses intérêts.
Toujours selon Global, le cabinet de Justin Trudeau aurait été prévenu de ces manœuvres de la Chine dès janvier dernier [2022].
Ils ont eu des séances d’information en janvier, il y a 10 mois, peut-être même avant. Cela dit, il semblerait que rien n’a été fait de la part du premier ministre et du gouvernement malgré les preuves, a déploré le député conservateur Michael Cooper, comme le chef du PCC, Pierre Poilievre, l’a fait la semaine dernière.
Personne n’a été renvoyé du Canada, personne n’a été mis en accusation, aucune enquête apparente n'a été entreprise et il n’y a pas eu d’actions faites par le gouvernement pour offrir une réponse au niveau législatif, a-t-il souligné.
« On veut savoir qui savait… Qui était au courant… Comment est-ce qu’on a appris l’existence de cette ingérence étrangère là et pourquoi on n’en a rien su entre 2019 et 2021. »
— Une citation de Luc Berthold, député de Mégantic—L'Érable
Les députés libéraux ont rétorqué que leur gouvernement prévient, depuis des années maintenant, les autres partis de la Chambre des risques d’ingérence étrangère dans chaque processus électoral non seulement de la part de la Chine, mais aussi de plusieurs autres pays, dont l’Iran et la Russie.
La députée libérale Jennifer O’Connell a rappelé aux conservateurs que des rapports du NSICOP faisant état spécifiquement de cette menace leur avaient été soumis à la Chambre des communes avant les élections de 2019. Elle leur a demandé où ils étaient pendant ce temps.
Ils étaient occupés à soutenir le convoi des gens qui disaient qu'il fallait renverser le gouvernement. Où étaient-ils pour protéger la démocratie à ce moment?, a lancé Mme O'Connell.
La motion conservatrice, qui bénéficiait notamment de l’appui de la députée bloquiste de Laurentides-Labelle, Marie-Hélène Gaudreau, et de sa collègue néo-démocrate, Rachel Blaney, a finalement été adoptée par six voix contre cinq.
Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre poursuivra ses travaux mardi, le 15 novembre 2022.
Rappelons que l'ouverture des travaux de ce comité de la Chambre des communes sur l'ingérence de la Chine dans le processus électoral canadien survient quelques jours après l'annonce, par les autorités fédérales, de l'ouverture d'une enquête sur l’existence de postes de police chinois illégaux dans la région du Grand Toronto et de l’arrestation toute récente d’un employé d’Hydro-Québec accusé d’avoir livré des secrets industriels à la Chine.
Source: Radio-Canada
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