Jean-François Lisée donne l’heure juste

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2018 est un enjeu déterminant: il faut d’abord sauver le Québec

24 mai 2016

Gérald Larose - Professeur invité de l’UQAM, Président du Conseil de la souveraineté du Québec, 2003-2013

« Lumières ! Caméra ! On tourne ! Prise 2. » Est-ce bien le cas ? En deux ans, bien des choses ont changé. Nous sommes maintenant bel et bien en pleine déconstruction « structurelle » du modèle québécois de développement.

Outre les quatre milliards et plus de coupes cumulatives et le traumatisme très sévèrement et très coûteusement contre-productif infligés au système de santé (la moitié du budget du Québec), le régime Couillard a éliminé 26 programmes, pulvérisé 11 structures de dialogue social et de co-construction de politiques publiques, fermé une majorité de bureaux régionaux de huit ministères et éteint sept antennes internationales.

Ce que Charest avait amorcé comme virage marchand (privatisation de l’éolien, du gazier, de la surveillance des travaux publics, des CPE, etc.) et comme mise à l’écart de la société civile (abolition des conseils régionaux de développement, des régies régionales de santé, des CA de CLSC, etc.), Couillard l’a accentué et institutionnalisé. Et d’aucuns voudraient que la course à la direction du Parti québécois ne soit qu’une supplémentaire. La partie n’est plus la même.

2016 n’est plus 2014. Encore moins 1996 ou 1982, dates des grandes concertations, négociations et innovations sociales. Ce que la société civile plurielle du Québec, avec tous les gouvernements péquistes et celui de Robert Bourassa, avait construit comme mécanismes de dialogue social et de développement socio-économique a volé en éclats.

Des acquis ascendants

Pourtant, tous conviennent que le modèle québécois a produit des acquis ascendants en matière d’émancipation des droits, de démocratisation des pratiques politiques, de réduction des inégalités, d’explosion culturelle et de rayonnement international. La Révolution tranquille et le modèle partenarial en construction qui lui a succédé nous ont conduits à une société plus prospère, plus égalitaire et plus solidaire. Pour être précis, il faut dire « plus prospère et égalitaire parce que plus solidaire ».

Ce résultat tient à l’interaction de deux types d’acteurs : une société civile bien organisée et active dans le dialogue social et une classe d’hommes et de femmes politiques qui croient au rôle majeur de la puissance publique dans la promotion du bien commun, dans l’émancipation économique et sociale de la nation et dans la lutte contre les inégalités et contre les discriminations. Jusqu’à tout récemment, le Québec résistait mieux que quiconque à la dégradation de ses acquis ascendants. Aujourd’hui, la marche néolibérale forcée des régimes Charest et Couillard a inversé les indicateurs. Jusqu’à remettre en cause les bases mêmes du projet national.

Ce projet national n’a jamais été la propriété privée des souverainistes. À l’époque, tant les fédéralistes que les souverainistes portaient des propositions qui visaient le développement autonome du Québec et son épanouissement collectif. Bien qu’ils divergeassent sur la portée ultime de leurs démarches, les deux camps militaient pour garantir au Québec son avenir économique, social et culturel.

Depuis, le Canada s’étant verrouillé lui-même sur cet enjeu, les ténors fédéralistes québécois n’ont eu d’autre choix que de se mettre à militer pour la « canadianisation » du Québec. C’est une autre dimension de l’impitoyable et cruelle politique d’austérité du régime Couillard.

Érosion du sentiment d’appartenance

En quoi consiste-t-elle ? D’abord à renoncer au plein exercice de plusieurs de nos compétences. Aussi, à priver l’État du Québec de ses moyens en refusant systématiquement de revoir ses entrées de fonds. Également à sous-traiter à Ottawa nombre de ses responsabilités, dont la plus lourde de conséquences est le projet parfaitement anticlimatique d’Énergie Est.

Mais plus dramatiquement encore, la politique d’austérité de Couillard conduit à éroder le sentiment d’appartenance des Québécois et des Québécoises à leur État. Les plus vulnérables se sentent et se savent abandonnés. Idem pour les femmes, les régions, le monde rural, le mouvement communautaire et combien d’autres. Même des fleurons économiques quittent le Québec sous des haussements d’épaules de ministres.

Si au moins la commission Charbonneau avait dissipé les odeurs de corruption. Plus encore que la brisure du lien d’appartenance, c’est l’outil incontournable de développement que sont l’État québécois et son modèle partenarial sous-jacent qui s’effrite. Sans la restauration du lien de confiance et la restauration de l’État québécois dans ses fonctions régaliennes et de développement, l’indépendance deviendra objectivement impossible.

Lisée a raison

Jean-François Lisée a raison. 2018 est un enjeu déterminant : il faut d’abord sauver le Québec. Et en deux ans, il est possible de rassembler une majorité de Québécoises et de Québécois dans la poursuite de cet objectif. Il en faudra davantage pour réaliser l’indépendance.

Le mouvement indépendantiste québécois étant pluriel, converger vers l’indispensable feuille de route commune pour réussir prendra du temps et se conclura en dehors de la dynamique électorale. Les canadianistes ayant réussi à ce que la population méprise, sinon rejette le noble exercice démocratique qu’est le référendum, le réhabiliter supposera que le projet qui ultimement en sera l’objet soit débattu en long et en large de telle sorte que la population en arrive à trouver sain et normal qu’il soit démocratiquement soumis aux voix. C’est ce que Lisée propose comme enjeu de 2022.

Je n’ai pas été le seul, un temps, à partager l’avis qu’il fallait tout lier. Plus récemment, je souhaitais plutôt qu’on mette le cap sur l’indépendance. Aujourd’hui, je note que nous ne pouvons pas faire l’économie d’une remise à plat des orientations stratégiques en prenant en compte la pluralité des acteurs indépendantistes, l’oeuvre de destruction massive du régime Couillard et la nécessaire recrédibilisation des mécanismes de décisions démocratiques. Et ça ne peut pas se faire en un tour de main en mêlant à la fois tous les enjeux. À cette enseigne, Lisée donne l’heure juste.


Source: Le Devoir
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

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