Cent trente-six pays se sont entendus pour imposer une taxation minimale à 15 % sur les multinationales, a annoncé vendredi l'OCDE, après le ralliement de l'Irlande, de l'Estonie et de la Hongrie.
La réforme majeure du système fiscal international finalisée aujourd'hui à l'OCDE permettra de garantir l'application d'un taux d'imposition minimum de 15 % aux entreprises multinationales à compter de 2023, a indiqué l'OCDE dans un communiqué, saluant un accord historique.
Ces 136 pays, qui représentent 90 % du PIB mondial, vont pouvoir dégager environ 216 milliards de dollars canadiens de recettes supplémentaires grâce à cet impôt minimum, souligne l'OCDE.
Le Kenya, le Nigeria et le Sri Lanka, associés aux négociations qui comprenaient 140 pays, ne font pas partie des signataires. Le Pakistan, pourtant inscrit dans une précédente liste de pays signataires, ne figure plus non plus dans celle de vendredi.
Le président américain Joe Biden a assuré dans un communiqué qu' un impôt minimum mondial fort permettra enfin d'équilibrer les conditions de concurrence pour les travailleurs et les contribuables.
Il s'agit d'un grand pas en avant pour rendre notre système fiscal plus équitable.
Une citation de :Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne
Le ministre français de l'Économie, Bruno Le Maire, a pour sa part salué un accomplissement majeur, décisif et affirmé vouloir traduire en acte juridique cet accord international au cours de la présidence française de l'Union européenne, au premier semestre 2022.
Ottawa évoque un accord historique
Dans une déclaration transmise par voie de communiqué, la ministre des Finances et vice-première ministre du Canada, Chrystia Freeland, évoque un accord international historique qui profitera aux Canadiens de la classe moyenne et aux entreprises canadiennes.
Le Canada appuie fermement les efforts déployés à l’échelle internationale pour mettre fin à la course au moins-disant fiscal et pour faire en sorte que toutes les sociétés, y compris les plus grandes sociétés du monde, paient leur juste part, ajoute-t-elle.
Un premier accord sur les grandes lignes d'une fiscalité internationale avait été trouvé en juillet. Il s'agissait cette fois de définir des paramètres techniques, mais objet d'âpres négociations entre États aux stratégies fiscales nationales très variées.
Le verrou clé des 15 % a sauté dès jeudi avec le ralliement de l'Irlande et ensuite de l'Estonie, deux pays qui rechignaient jusque-là à apposer leur paraphe au texte.
Pour Dublin, qui abrite les sièges européens d'Apple, de Facebook et de Google, l'assurance d'un taux fixe à 15 % a été décisive. L'accord de juillet mentionnait au moins 15 %, laissant la porte ouverte à un relèvement.
Vendredi, la Hongrie, dernier pays de l'Union européenne à ne pas avoir sauté le pas, a elle aussi rejoint l'accord après avoir obtenu des concessions.
Budapest, qui impose les sociétés à 9 %, fait partie des États misant sur l'attractivité fiscale et a réussi à faire augmenter les déductions qui seront autorisées pour calculer la base imposable pour les multinationales.
La redistribution des recettes fiscales
L'autre gros morceau de la négociation à l'OCDE portait sur la part des recettes fiscales qui seront redistribuées dans les pays où les multinationales ont des activités et des clients, mais pas de siège social.
Cela concerne seulement les très grands groupes qui enregistrent plus de 20 milliards d'euros de chiffre d'affaires chaque année et affichent une rentabilité élevée. La part des bénéfices taxés dans ce cadre, objet d'un savant calcul, a été fixée à 25 % au-delà d'un niveau de rentabilité de 10 %.
Si l'accord est présenté comme historique, des ONG et certains économistes l'ont jugé insuffisamment ambitieux et porteur d'inégalités entre pays riches et en développement.
D'après Oxfam, les pays les plus pauvres récupéreront moins de 3 % des recettes fiscales supplémentaires. L'ONG a dénoncé un simulacre et une capitulation vis-à-vis des pays aux taux d'imposition les plus faibles.
Quant à la redistribution des recettes fiscales aux États où l'activité des multinationales est réalisée, les États-Unis et l'Europe vont essentiellement en bénéficier, affirme à l'AFP Daniel Bunn, responsable des projets internationaux à la Tax Foundation, à Washington. En effet, les multinationales y abritent leurs sièges sociaux et la plupart de leurs clients.
Le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz, qui militait pour une taxe minimum de 25 %, a aussi regretté dès jeudi un accord qui ne s'adresse pas assez aux inquiétudes des pays en développement et des pays émergents.
L'objectif est une mise en application de la réforme d'ici 2023, le temps d'adapter les législations. Mais certaines questions restent en suspens, telles que la capacité de l'administration américaine à imposer la réforme au Congrès.
Source: Radio-Canada / AFP
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