Loi 21 et PL-96: La Charte québécoise foulée aux pieds… dans l’indifférence totale

Répondre
Avatar du membre
cgelinas
Administrateur
Messages : 7781
Enregistré le : 25 mai 2010, 22:07
Localisation : Lévis, QC
Contact :

16 mai 2021


Il y a beaucoup à dire sur le projet de loi 96 déposé cette semaine par le ministre Simon Jolin-Barrette.

Celui-ci comporte des gestes à la portée symbolique certaine. D’autres auront sans doute un effet favorable sur la préservation de la langue française, un objectif que tous partagent au Québec.

Cependant, l’approche généralement modérée adoptée par le gouvernement Legault est noyée par un recours abusif à la clause dérogatoire des chartes canadienne et québécoise des droits et libertés.

La charte canadienne étant illégitime aux yeux de plusieurs Québécois, je ne m’attarderai ici qu’à l’article affirmant que les dispositions de la loi s’appliqueront « malgré les articles 1 à 38 de la Charte des droits et libertés de la personne », la Charte québécoise.

Faisons une pause ici pour rappeler que cette Charte a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale en 1975. À l’occasion, le ministre de la Justice, le libéral Jérôme Choquette, déclara : « La Charte permettra de définir avec précision un idéal de justice qui fera, j’en suis sûr, l’unité du Québec autour de valeurs démocratiques que nous voulons garantir contre toute violation. » Le député péquiste et constitutionnaliste Jacques-Yvan Morin renchérit : « Son adoption marque une étape importante sur le chemin qui mène à un plus grand respect des droits de la personne au Québec. »

Nous ne sommes donc pas ici devant une charte « enfoncée dans la gorge » des Québécois. La Charte des droits et libertés de la personne a longtemps été un objet de fierté au Québec. Ce n’est apparemment plus le cas. J’en veux pour preuve l’indifférence complète suscitée par la neutralisation, d’abord par le projet de loi 21, maintenant par le nouveau projet de loi 96, de la plupart des droits protégés par la Charte.

Je ne conteste pas le droit d’un gouvernement d’avoir recours à une telle clause. Je déplore le choix du gouvernement Legault de nier toute une série de droits fondamentaux qui n’ont rien à voir avec l’objet des deux lois en question.

Ainsi, tout comme la loi 21, le projet de loi 96 écarte les articles qui garantissent :
  • le droit à la vie et à l’intégrité de la personne ;
  • le droit au secours d’une personne dont la vie est en péril ;
  • la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association ;
  • le droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation ;
  • le droit au respect de sa vie privée ;
  • le droit à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens ;
  • le droit de se porter candidat lors d’une élection et le droit d’y voter ;
  • le droit à une audition publique et impartiale de sa cause par un tribunal indépendant.
Et j’en passe.

[Éditeur: il est TRÈS IMPORTÙNT que vous alliez lire les articles 1 à 38 qui sont "écartés".]

Drôle d’équilibre

Interrogé sur le recours à la clause dérogatoire, le premier ministre Legault a parlé d’un « équilibre » entre les droits collectifs et les droits individuels. Désolé, il ne peut pas y avoir d’équilibre quand les seconds sont tout simplement balayés du plateau de la balance.

Lors de l’audition de la contestation du projet de loi 21, le juge Blanchard avait demandé au représentant du Procureur général pourquoi le gouvernement avait jugé bon d’adopter une clause de dérogation à portée aussi vaste. L’avocat avait répondu : « Il fallait se prémunir contre l’inventivité des personnes qui voudraient contester la loi 21. » « Voilà une bien mince et troublante explication », avait laissé tomber le juge.

Ce qui est vraiment troublant, c’est que cela se passe avec le consentement béat non seulement de la majorité, mais aussi de ceux dont cela devrait heurter les convictions les plus profondes.

« Le diable est dans les détails », disent les partis de l’opposition. Pourtant, le diable est là, gros comme Godzilla.

Robert Bourassa l’a fait, rappellent plusieurs. Non. Dans la loi 178 adoptée en 1988, M. Bourassa a appliqué la clause dérogatoire à seulement deux articles de la Charte québécoise (contre 38 pour les lois 21 et 96). De surcroît, il l’a fait « avec beaucoup de réticence », tandis que le premier ministre actuel emprunte ce chemin avec une insouciance que n’aurait certainement pas affichée René Lévesque. Pierre Trudeau et Claude Ryan, eux, auraient vigoureusement combattu une telle manœuvre. Les héritiers de ces trois grands Québécois ne sont visiblement pas tirés du même moule.

Si, chaque fois que la majorité québécoise estime ses valeurs ou sa culture en péril, les droits de la personne sont éviscérés, je ne donne pas cher des droits fondamentaux au Québec dans quelques dizaines d’années. Surtout si cela se passe dans l’indifférence, voire dans l’enthousiasme collectifs.




Source: La Presse




-- -- --
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

Blogues: Montréal | Québec | Lévis | Emploi | Éducation | Placements | Transports
Dons: PayPal | DonorBox Web: Achetez vos noms de domaines au plus bas prix...
Avatar du membre
cgelinas
Administrateur
Messages : 7781
Enregistré le : 25 mai 2010, 22:07
Localisation : Lévis, QC
Contact :

Dans le "Journal des débats de l'Assemblée nationale" du jeudi 13 mai 2021 - Vol. 45 N° 191, ici:

http://assnat.qc.ca/fr/travaux-parlemen ... 98749.html

Simon Jolin-Barrette a présenté son "Projet de loi n° 96 — Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français", ici:

http://assnat.qc.ca/fr/travaux-parlemen ... oc72324727

Afin de le mettre aux voix, ici:

http://assnat.qc.ca/fr/travaux-parlemen ... oc72324729

Vous pouvez dès lors constater que TOUS les partis d'opposition se sont prononcés POUR le projet de loi 96 de Simon Jolin-Barrette. Les deux députés "indépendants" aussi ont voté "pour". Incluant Gabriel Nadeau-Dubois, de Québec solidaire.

En conséquence, le Président a déclaré que la motion était donc adoptée.

C'est comme ça que les parlementaires, à l'Assemblée nationale, à Québec, ont fait adopter la motion du Caquiste-décrétiste Simon Jolin-Barrette.

--

Donc là, on a parlé du projet de loi 96 qui devrait, normalement, faire l'objet de "consultations générales" demandées par l'opposition, notamment par le député libéral André Fortin.

Pour comprendre la suite de cet exposé, il faut s'intéresser à la Loi 21.

La Loi sur la laïcité de l'État ou la loi 21 est une loi québécoise adoptée le 16 juin 2019 par l’Assemblée nationale du Québec.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_sur_l ... u%C3%A9bec.

Retenez bien la date.

16 juin 2019.

C'est la date où la CAQ avait fait entrer en vigueur l'article 33 de la "L-0.3 - Loi sur la laïcité de l’État":

http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/showve ... e=20201022

Voici ce qui y était déclaré:

"33. La présente loi ainsi que les modifications qu’elle apporte à la Loi favorisant la neutralité religieuse de l’État et visant notamment à encadrer les demandes d’accommodements pour un motif religieux dans certains organismes s’appliquent malgré les articles 1 à 38 de la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12).

2019, c. 12, a. 33."

Comme le disait André Pratte dans son article de La Presse, cet extrait de la Loi 21 "écarte les articles qui garantissent" nos droits parmi les plus fondamentaux, comme celui "à la vie et à l’intégrité de la personne".

https://forum.chaudiere.ca/viewtopic.php?f=19&t=2479

Pour prendre connaissance des articles 1 à 38 de la "C-12 - Charte des droits et libertés de la personne", c'est ici:

http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/showdoc/cs/c-12

Et vous allez voir, il s'agit de droits fondamentaux absolument incontournables.

--

Il y a assurément moyen de protéger le français, au Québec, sans atteindre à nos droits fondamentaux, au Québec.

Pour l'heure, la CAQ et sa volonté de "modifier sa section de la Constitution" (qui serait d'ailleurs approuvée aussi bien par Justin Trudeau que tous les partis d'opposition, à Ottawa) éviterait, en théorie, une "bataille constitutionnelle" avec le fédéral.

Vu la complaisance de tous les partis à Ottawa en regard de cette modification à venir de la Constitution, François Legault pourra "amender la Constitution comme il aspire à le faire dans le cadre de sa réforme de la loi 101".

https://www.lapresse.ca/actualites/poli ... rudeau.php

Encore une fois, la langue française serait légèrement mieux protégée mais si c'est au prix de nos droits fondamentaux (en lien avec les articles 1 à 38 de la C-12), alors c'est irrecevable, à sa face-même.




Source: Ma publication, dans Facebook

Vous pouvez aussi écouter Simon Jolin-Barrette lors de son point de presse intitulé "Le PM du Québec François Legault présente un projet de loi pour réformer la Loi 101 – 13 mai 2021".

Simon Jolin-Barrette a aussi bénéficié d'une entrevue particulièrement complaisante, au Télé-journal de RC.




-- -- --
Fichiers joints
simon-jolin-barrette-en-point-de-presse.jpg
simon-jolin-barrette-en-point-de-presse.jpg (95.25 Kio) Vu 12297 fois
pl-96-qui-ajoute-dans-la-loi-constitutionnelle-de-1867.jpg
pl-96-qui-ajoute-dans-la-loi-constitutionnelle-de-1867.jpg (70.88 Kio) Vu 12297 fois
loi-21-l-0-3-loi-sur-la-laicite-de-l-etat-article-33.jpg
loi-21-l-0-3-loi-sur-la-laicite-de-l-etat-article-33.jpg (79.65 Kio) Vu 12297 fois
c-12-charte-des-droits-du-quebec.jpg
c-12-charte-des-droits-du-quebec.jpg (77.8 Kio) Vu 12297 fois
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

Blogues: Montréal | Québec | Lévis | Emploi | Éducation | Placements | Transports
Dons: PayPal | DonorBox Web: Achetez vos noms de domaines au plus bas prix...
Avatar du membre
cgelinas
Administrateur
Messages : 7781
Enregistré le : 25 mai 2010, 22:07
Localisation : Lévis, QC
Contact :

Je viens d'aller consulter ton lien mais je n'avais pas lu les précédentes interventions alors je peux pas vraiment commenter ce sur quoi ils reculent.

Ceci dit, fondamentalement, voici le texte très exact qui a été adopté à l'article 33 de la "L-0.3 - Loi sur la laïcité de l’État", le 16 juin 2019:
"La présente loi ainsi que les modifications qu’elle apporte à la Loi favorisant la neutralité religieuse de l’État et visant notamment à encadrer les demandes d’accommodements pour un motif religieux dans certains organismes s’appliquent malgré les articles 1 à 38 de la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12)."
Honnêtement, ça dit pas mal ce que ça dit.
"malgré les articles 1 à 38 de la Charte"
Est-ce que ça peut vraiment être plus clair que ça?

--

Ce que j'ai relaté dans ma publication me semble toujours juste.

C'est surtout un survol de l'état des lieux, pour ainsi dire.

--

Bien que CAP explique que ça ne concerne que "cette loi en particulier et son application de façon spécifique qui concerne la protection du français", c'est toujours bien écrit ce qui est écrit.

--

Qu'en pensez-vous?




Source: Mon commentaire, dans Facebook

En réponse à Pauline Sénéchal qui me demandait de lui dire ce que je pensais de cette publication de CAP:

Nous avons retiré la publication concernant la loi 96 . Il semblait y avoir une mauvaise interprétation de ce que nous avions publiés. Donc question de remettre les pendules à l’heure, le projet de loi 96 n’abolie aucun droit prévu par les chartes.

Ça ne concerne que cette loi en particulier et son application de façon spécifique qui concerne la protection du français. Elle s’appliquera dans sa totalité même si certains articles portent atteinte à certains droits présent dans la charte (ceux que nous avons énumérés) et c’est là dessus que notre critique se portait.

Mais nous comprenons la confusion et nous nous en excusons. En espérant tout de même que çà vous rassurera un peu.

Ajout: Les journalistes ont tout de même le devoir de questionner le Premier ministre sur le changement de terme « droits et libertés fondamentaux » pour « droits et libertés de la personne ». Çà n’a évidemment aucun rapport avec la protection du français et c’est un questionnement majeur et légitime. Faites votre boulot les médias, çà nous prend des réponses. J’vous invite également tous individuellement à écrire à votre député et posez leur la question.

Il y a aussi un article de source anonyme intitulé "PL 96 – Le diable est dans les détails" dans un blogue portant le nom de "Vérités et conséquences" où les changements sont dénoncés.




-- -- --
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

Blogues: Montréal | Québec | Lévis | Emploi | Éducation | Placements | Transports
Dons: PayPal | DonorBox Web: Achetez vos noms de domaines au plus bas prix...
Avatar du membre
cgelinas
Administrateur
Messages : 7781
Enregistré le : 25 mai 2010, 22:07
Localisation : Lévis, QC
Contact :

Eric Lavallee a publié ce qui suit, en commentaire, dans Facebook

Après un an, vous n’avez jamais POINTÉ la loi qui rendait les mesures sanitaireS ILLÉGALES, donc vous êtes complètement ignorant de NOS DROITS FONDAMENTAUX ET CONSTITUTIONNELS.

Eux, ils ont été AVISÉ à plusieurs reprises. Ils connaissent très bien leurs FAUTES....

#PIERREDAOUST

Malgré l’urgence sanitaire, la loi sur la santé publique n’énonce pas EXPRESSÉMENT qu’elle s’applique malgré la charte Québécoise...🤷‍♂️

EXPRESSÉMENT

adverbe

En termes exprès, formels ; avec une intention bien définie.

Nos DROITS FONDAMENTAUX ET INALIÉNABLES ont PRÉSÉANCE.

1. Tout être humain a droit à la vie, ainsi qu’à la sûreté, à l’intégrité et à la liberté de sa personne.

Il possède également la personnalité juridique.

52. Aucune disposition d’une loi, même postérieure à la Charte, ne peut déroger aux articles 1 à 38, sauf dans la mesure prévue par ces articles, à moins que cette loi n’énonce EXPRESSÉMENT que cette disposition s’applique malgré la Charte.

Voici à quoi ressemble un énoncé FORMEL, tiré du projet de loi 96.

DISPOSITIONS FINALES

199. La présente loi ainsi que les modifications qu’elle apporte, autres que celles des articles 1 à 119 et 133 à 136, s’appliquent malgré les articles 1 à 38 de la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12)

Voici la loi sur la santé publique.

123. Au cours de l’état d’urgence sanitaire, malgré toute disposition contraire, le gouvernement ou le ministre, s’il a été habilité, peut, sans délai et sans formalité, pour protéger la santé de la population:

« Malgré toute disposition contraire » n’est pas un énoncé exprès.

Eric Lavallee a ensuite ajouté ce commentaire:

Oui il a besoin d’avoir de bonne explication...

135. L’article 9.1 de [La Charte des Droits et Libertés de la Personne du Québec] est modifié, dans le premier alinéa :

1. °par le remplacement de « libertés et droits fondamentaux » par « droits et libertés de la personne »;

Quelle est la différence entre « exercer les libertés et droits fondamentaux » et « exercer les droits et libertés de la personne » ?

Quelle est la différence entre « aménager et fixer la portée des libertés de droits fondamentaux » et « aménager et fixer la portée des droits et libertés de la personne » ?

SURTOUT, en quoi changer « libertés et droits fondamentaux » pour « droits et libertés de la personne » protège la langue française ?

Charte

52. Aucune disposition d’une loi, même postérieure à la Charte, ne peut déroger aux articles 1 à 38, sauf dans la mesure prévue par ces articles, à moins que cette loi n’énonce expressément que cette disposition s’applique malgré la Charte.

96

"DISPOSITIONS FINALES

199. La présente loi ainsi que les modifications qu’elle apporte, autres que celles des articles 1 à 119 et 133 à 136, s’appliquent malgré les articles 1 à 38 de la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12)

Pete.

Je sais pertinement qu'à chaque fois qu'ils ont lu "Je souhaites faire VALOIR mes "Droits Fodamentaux" sur tout ce qur j'ai pu leurs envoyer, la chienne leurs rentrait dedans solide. Car c'est clair que je savais et comprenait la puissance que ces affirmations dévoilaient et surtout déployaient devant leurs yeux... dites-vous bien que ceux/celles qui prennent la décision de faire ca ne veulent plus jamais vivre un tel choc, c'est à dire un homme qui connait ses droits à fond. Je suis assomé et en même temps c'est la suite logique....et ça démontre clairement qu'effectivement certains membre du barreau du Québec vont aller jusque là pour s'assurer de rester NOS MAITRES à tout jamais...

Nous sommes foutu et complètement cuits 😕

À noter que l'avocat Gloriane Blais a publié ceci, à propos de la saisie d'écran, plus bas qui montre l'article 135 visant à remplacer "libertés et droits fondamentaux" par "droits et libertés de la personne":

Faut le lire avec l'article 9.1 de la Charte:

"9.1. Les libertés et droits fondamentaux s’exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de la laïcité de l’État, de l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec.

La loi peut, à cet égard, en fixer la portée et en aménager l’exercice."



-- -- --
Fichiers joints
remplacement-de-libertes-et-droits-fondamentaux.jpg
remplacement-de-libertes-et-droits-fondamentaux.jpg (190.77 Kio) Vu 9182 fois
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

Blogues: Montréal | Québec | Lévis | Emploi | Éducation | Placements | Transports
Dons: PayPal | DonorBox Web: Achetez vos noms de domaines au plus bas prix...
Avatar du membre
cgelinas
Administrateur
Messages : 7781
Enregistré le : 25 mai 2010, 22:07
Localisation : Lévis, QC
Contact :

C'est Charles Olivier qui partage ce qui suit, à propos d'un avocat anonyme qui aurait rapidement passé en revue le PL-96.

Je viens d'enfin recevoir l'opinion que j'avais demandé sur le projet de loi 96, de la part d'un avocat criminaliste qui pratique depuis plus de dix ans (et qui na naturellement demandé à conserver l'anonymat)... et je dois avouer que ça aura quand même valu la peine d'attendre quelques jours, pour le moins qu'on puisse dire !! 😆😅😁🙃😇

Il faut aussi reconnaître que pour répondre de façon efficace à une question légale pointue et ambiguë, mieux vaut prendre le temps de le faire, puis le faire d'une façon complète et détaillée !!!... 😉

C'est d'ailleurs pourquoi je vous transmets ici-bas sa réponse pas mal en totalité, tandis que je n'ai fait que reformuler une tournure de phrase ou deux, puisque étant donné qu'il a vraiment fait le plus vite qu'il pouvait (!), il me fallait tout de même transformer une discussion Messenger en un "texte en bonne et due forme" !!... 😉

Je ne commencerai donc pas à dupliquer ou résumer ses constats, mais disons simplement que... c'est (quand même très) encourageant (!), même si cela ne nous incite pas moins à la plus grande vigilance, notamment compte tenu que cela démontre, de façon encore plus claire que jamais, les velléités dictatoriales de Legault, et notamment son affection pour l'arbitraire, et plus précisément pour ce qui est de se créer une sorte de droit à légiférer "à sa discrétion", ou en d'autres termes comme bon lui semble !!!...😤😠😡🤬



TEXTE # 1

Je n'ai pas eu le temps de scruter chaque détails du PL96, mais je peux dire ceci. Le fonctionnement de la clause dérogatoire ou clause "nonobstant" est que pour servir, elle doit être explicitement utilisée dans la loi qu'elle vise à protéger. En principe, seule cette loi est protégée par la clause; il est donc inutile de même tenter d’en protéger toutes les lois du Québec. Cela avait été tenté par Bourassa et la Cour suprême a dit que ce n'est pas comme cela que la clause nonobstant fonctionne.

Maintenant, le PL96, comme bien d'autres projets de loi, apporte des modifications à d'autres lois. Ces modifications se trouveraient elle-aussi protégées par la clause dérogatoire, car elles s’inscrivent ainsi dans le même projet de loi.

Pour déterminer le réel impact, il faudrait comparer la modification apportée par le PL96 à une loi antérieure, en y allant article par article.

Après en avoir fait en tout cas une première lecture d’ensemble, il ne me semble pas y avoir d'atteinte à des droits comme celui de manifester, de refuser certains soins médicaux, ou encore d'avoir un blogue NON commercial dans une autre langue
Par contre, des obstacles évident à l'accès aux droits peuvent survenir pour les personnes qui ne lisent pas ou ne parlent pas très bien le français. Par exemple, puisque dorénavant les règlements municipaux ne seront communiqués qu’en français, cela peut signifier plus de tickets pour les anglophones.

Le PL96 risque également d’entraîner des délais judiciaires, car lorsque le juge rend une décision écrite en anglais pour des partie parlant anglais, il va probablement le prendre en délibéré plus longtemps pour pouvoir avoir la traduction française immédiatement, de telle sorte que des gens vont attendre leur jugement plus longtemps.

Le Code civil et le code de procédure civil sont amendés pour prévoir que tout acte juridique étranger doit être traduit en français avant de servir à la cour. avant, c'était au choix français ou anglais. du coup, si tu veux poursuivre eBay, il faudra une traduction certifié des "terms of service". un frein financier à l'accès à la justice.

Pour le fonctionnement de l'appareil de santé, l'impact sera probablement de raréfier le personnel capable de vraiment bien expliquer en anglais même si le droit demeure. Si on pense par exemple à un enjeu comme le vaccin, on pourrait se demander si les anglophone recevront d'aussi bonne explications et comprendront aussi bien.

Mais une chose est claire: ceci n'est pas, à première vue, une loi pour nous passer la clause nonobstant pour toutes les lois du Québec et éliminer la charte. Ce n'est PAS cela. mais les impacts pourraient créer deux catégories de citoyens sur la base du français.

Pour ce qui est d'utiliser la totalité de la clause au lieu de juste les parties raisonnablement pertinentes, le PG aurait dit à la Cour pourquoi dans un débat sur PL21 : « ils sont nerveux que des avocats et juges créatifs trouvent des idées genre "ma religion demande de parler en anglais ».

Normalement, les droits à limiter les plus pertinents pour protéger le français serait l'égalité, la liberté d'expression et d'association… mais vu que ce gouvernement semble avoir de la méfiance et du mépris envers les tribunaux et les avocats, ils ont décidé de ratisser plus large pour faire plus sûr.

La loi n'est PAS une loi visant à neutraliser de manière générale la Charte sauf quand un droit ou liberté entre en conflit avec la primauté du français. mais il peut y avoir des effets indirect, comme de rendre la justice ou des explications médicales inaccessible aux anglophones, ce qui d’ailleurs était déjà un problème pour les immigrants allophones. Elle pourrait aussi se voir détournée pour censurer des idées en certains cas comme le journal libertaire "The Suburban", qui est en anglais seulement. Tu n'aimes pas que Beryl Wajsman ait critiqué l'état policier durant la manif où il a été mal traité par la police, alors tu lui fait une plainte que son journal est en anglais seulement. Ce genre de choses pourrait arriver.

Ce n'est toutefois PAS une abolition générale de la Charte.

Je pense que c'est surtout une grosse diversion flattant la fibre nationaliste et identitaire pour passer autre chose. genre calmer ceux des manifestants anti-mesures sanitaire qui arborait le drapeau des Patriotes, soit celui du "vieux de 1837"…. Ou encore, pendant qu'on parle de langue, les multinationale se font concéder des droits d’exploitation de nos ressources pour pas cher.

Par ailleurs, ce qui est plus inquiétant que cette loi elle-même, c'est que cela fait deux fois de la part de ce gouvernement qu'il utilise une clause nonobstant qui avant était un gros tabou que personne n'osait utiliser. Je crains qu'il cherche à banaliser les chartes, à nous conditionner à être peu ou pas attaché aux chartes. Un tel état d'esprit est inquiétant et nécessite de le surveiller.




TEXTE # 2

Si tu utilise la clause dans une loi sur la primauté du français qui interdit l'affichage et le travail en anglais, c'est seulement ces règles là qui seront protégée par la clause nonobstant. Cela n'affectera pas le droit de manifester (sauf peut-être le choix de langue sur les pancartes) ou le droit à des soins médicaux, du moins, pas directement (car ce sera un problème d'avoir les soins si personne de l'équipe soignante parle ta langue).

Alors en soi, le fait d’utiliser la clause nonobstant dans cette loi ne signifie pas que, par exemple, on puisse empêcher les gens d’exercer leur religion.

Legault n’en a pas moins décidé de ratisser large. Normalement, on utilise la clause nonobstant en partie, pour exclure ceux des droits qui peuvent raisonnablement être plaidé pour faire invalider la loi. Dans le cas de la primauté du français, on pourrait parler par exemple du droit à l'égalité et la liberté d'expression.

Mais lui, il paranoïe et extrapole à l’effet que des avocat et juges trouvent des idées pour dire que mettons, tel monsieur anglophone a une religion dans laquelle son dieu lui demande de communiquer en anglais, alors il va exclure aussi la liberté de religion juste pour faire plus sur...

Même l'article d’André Pratte, dans LaPresse, ne dit pas que tous ces droits seront exclus en général : ce qu’il dit, c'est qu'ils seront exclus comme base pour contester CETTE LOI-LÀ.

Mais c'est troublant de le voir ratisser aussi large et montrer à quel point il méprise le droit et les tribunaux.

C'est un peu comme les peines minimales de Harper. La logique était que Harper n'avait pas confiance en les tribunaux ni même en les procureurs de la couronne. Il considérait que des "deals" trop cléments était négocié pour fermer des dossier, alors il a adopté des minimums.

La différence est que la perception de Harper sur les deals parfois trop clément était nettement plus fondée que la perception de Legault que les juges inventerait des argument bidons pour miner la langue française.

La Cour suprême, dans Ford durant les années 80, a quand même maintenu la loi 101, ce qui prouve qu’elle n’est pas nécessairement « anti-français », comme Legault semble le croire.

La vraie question, c’est qu’il faut voir en détail chacune des règles proposée dans le PL96 et en évaluer les impacts.

Notamment, si on ne parle que d’affichage et de langue générale du travail, c’est une chose… mais c’en est une autre qu’on commence à parler de refuser de communiquer avec le citoyens dans une autre langue que le français! Il y auraient ainsi des gens qui seront mal servis et ne pourront pas exercer leur droits de manière égale.

Comme j'ai dit, il en a mis plus que pas assez parce qu'il paranoie que les avocats et juges trouvent des idées créatives; c'est à peu près cela d’ailleurs que le procureur général a dit en Cour supérieure concernant le PL21, et qu’on pourrait résumer par quelque chose du genre : "Qu'est-ce qui arrive si un juge pense qu'en réduisant le bilinguisme en santé on pourrait causer des morts ? Ben, on va exclure le droit à la vie!!! »...

Pour aborder ce qui est présentement un souci important pour bien des gens, je ne pense pas que le PL96 affecte le droit de refuser le vaccin...mais il pourrait affecter le droit que le feuillet d'info sur les effets secondaire soit disponible en anglais.

Comme j’avais commencé à l’expliquer plus haut, peu importe que tu mettes tout ou partie de la en clause dérogatoire/nonobstant, cette dernière ne pourra jamais s'appliquer qu'à la loi dans laquelle est est utilisée.

Cette réalité est d’ailleurs explicitement décrite dans la loi 96 elle-même, comme on peut le voir de par la formulation suivante; "LA PRÉSENTE LOI (ou l'article no. 123) s'applique malgré les article 1 à 38 de la Charte..…"

C'est pour cela que d’inclure la clause dérogatoire dans le PL96 n'est pas censé affecter la Loi sur les services de santé ou encore les règles du code civil sur le refus de soins.

Ceci dit, il n’est pas impossible qu’il y ait ramifications, et c'est pour cela qu'il faut lire les détails. Je ne sais pas, par exemple, si le PL96 se trouve à amender d'autres lois, et à dire des choses du genre qu'un refus de soin n'est valide que si fait en français.…

Cela me surprendrait, mais il faudrait tout lire pour en être bien sûr.

À mon avis, les dangers s'il y en a, serait dans une partie du projet de loi qui se trouverait à amender d'autres lois, ce qui en fait est plutôt courant dans les lois modificatrices de ce genre.

Parce qu’en de tels cas, ces amendements à d'autres lois seraient eux-aussi protégés par la clause dérogatoire. La clause dérogatoire protégerait ainsi tout le contenu du projet de loi, incluant les modifications qu'il apporte à d'autres loi.

C’est donc surtout cela qu’il faudrait selon moi examiner dans ce projet de loi, et c’est pourquoi il faut scruter les modifications à d'autres loi pour voir en quoi elles consistent.

MAIS, OUI : faites attention. Et j’en profiterais pour préciser que votre cause est aussi MA cause, la liberté. Cela étant, il est clair que si des exagérations sont dites sur ce projet de loi, vous aller jouer exactement dans le genre de diversion et de division que ce projet de loi semble viser à générer. La vraie menace est ailleurs.

Comme le fait qu’on ne parle plus du fait que les mesures sanitaires s'éternisent, tandis que M Dubé avoue lui-même, « candidement » (!), qu'il voudrait les utiliser pour "négocier" les conventions de travail.

En général, quand on agite la carte identitaire à un peuple économiquement colonisé, c'est pour le manipuler et éviter qu'il prenne le contrôle sur ses ressources et son économie.

Cela fait sans doute partie des raisons pour lesquelles le Québec fait partie des endroits du monde où le gouvernement a été capable d'imposer le plus de mesures liberticides "sanitaires", le plus longtemps et avec le moins de révoltes.

Je pense qu'elle est là la menace, et on en parlerait moins si M Legault réussissait à s’ériger en héro du français.

Mon impression est donc que c’est surtout ça, le but de Legault : de se présenter comme un héros du français pour nous faire oublier des choses ou nous en passer des petites vites, par exemple sur nos ressources naturelles et l'environnement.

Ceci dit, bonne nuit… Je dois rédiger un mémoire!


-- -- --
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

Blogues: Montréal | Québec | Lévis | Emploi | Éducation | Placements | Transports
Dons: PayPal | DonorBox Web: Achetez vos noms de domaines au plus bas prix...
Répondre