Le projet minier Matawinie, piloté par l'entreprise Nouveau Monde Graphite, deviendra ainsi le plus grand projet du genre en Occident, avec une surface à ciel ouvert pouvant atteindre jusqu'à 2,7 kilomètres de long.
Si cette annonce réjouit la direction de la Municipalité, certains opposants dénoncent la trop grande hâte avec laquelle le gouvernement Legault a rendu sa décision, avant d'avoir en main toutes les études environnementales pourtant demandées par le Bureau des audiences publiques en environnement (BAPE) dans son rapport rendu en juin dernier.
Ils craignent entre autres que les résidus acides résultant de l'extraction du minerai ne contaminent le site minier et ne se déversent dans ses zones de villégiature avoisinantes, dont le parc touristique du Mont-Tremblant et le parc régional du Lac Taureau.
Des études toujours en cours
Ugo Lapointe, qui dirige la coalition Pour que le Québec ait meilleure mine, se dit à la fois déçu et étonné de la vitesse à laquelle le gouvernement a rendu sa décision. Il y a toujours des études manquantes sur les risques quant à la pollution de l'eau et à la gestion des déchets acides, dit-il.
On ne comprend pas, renchérit M. Lapointe. Avant la sortie du rapport, des groupes citoyens avaient pourtant rencontré le ministre Fitzgibbon [alors ministre responsable de la région de Lanaudière] qui avait promis que toutes les recommandations du BAPE allaient être respectées.
Du côté de Nouveau Monde, on se défend d'avoir voulu procéder trop rapidement. Le BAPE a fait ses recommandations, il a demandé certaines études que nous avons approfondies, dit Sophie Paquet, chargée des communications pour la minière.
Nous nous sommes livrés à d'autres exercices [environnementaux] avec le ministère et 30 autres organismes. On a même fourni de la documentation additionnelle, ajoute-t-elle.
Mme Paquet précise que Nouveau Monde a développé une nouvelle méthode pour gérer les résidus acides issus de l'extraction du graphite, qui lui permet de désulphariser une partie de la roche extraite.
Même si cette méthode n'a pas été testée ailleurs dans le monde, Sophie Paquet assure que les tests en laboratoire sont concluants et que la minière a combiné plusieurs méthodes éprouvées en développant sa solution.
Mais Ugo Lapointe n'en démord pas. En ce moment, on donne le feu vert et on dit : "Allez-y, et on ajustera en cours de route", dit-il, décrivant un processus qu'il juge à l'envers. Une fois que la pâte à dents est sortie du tube, on ne peut plus la remettre dedans, illustre-t-il.
Le tourisme en jeu
Je ne peux pas croire qu'en 2021, on puisse penser qu'installer une mine comme celle-là dans un secteur qui a le plus grand potentiel de développement récréotouristique au nord de Montréal, ce soit une bonne idée, s'étonne Gilles Cartier, de l'Association pour la protection du Lac Taureau.
Pour sa part, le directeur général de la Municipalité de Saint-Michel-des-Saints, Sébastien Gariépy, se réjouit de ce que le projet minier aille de l'avant. Il y voit, justement, une façon de diversifier l'économie de la région.On vient de poser une bombe à retardement dans notre région.
Gilles Cartier, Association pour la protection du Lac Taureau
Le tourisme, c'est le moteur de notre économie, mais je suis content d'ajouter une nouvelle roue, dit-il, en vantant les retombées économiques du projet. S'il se dit lui aussi préoccupé par son impact environnemental, il certifie que tout est en place pour prévenir d'éventuels incidents.
En ce qui a trait au tourisme, M. Gariépy soutient que le projet minier a le potentiel d'attirer encore plus de visiteurs dans sa région. Je m'imagine tout à fait quelqu'un partir de Montréal pour venir voir nos paysages, s'arrêter au centre-ville pour prendre un café, et se dire : ''Tiens, je vais aller voir la mine'', dit-il.
Le graphite fortement demandé
Le graphite est particulièrement convoité ces dernières années, puisqu'il constitue un composant essentiel à la fabrication des batteries au lithium-ion, qui propulsent les voitures électriques.
Pour ce faire, le graphite doit toutefois subir une seconde transformation. C'est pour cette raison que Nouveau Monde a prévu la construction d'une usine à cet effet, à Bécancour.
Sophie Paquet assure que cet engouement est bien présent et que le carnet de commandes de Nouveau Monde se remplit rapidement.
Gilles Cartier, de l'Association pour la protection du Lac Taureau, se montre sceptique quant à l'avenir du minerai.
On voit déjà que les grandes compagnies, comme Tesla, développent de nouvelles technologies plus efficaces pour leurs batteries, et qu'elles expérimentent avec l'hydrogène, entre autres. Le graphite, ce n'est pas viable à long terme, estime-t-il.
Source: Radio-Canada
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