45 pédiatres sonnent l’alarme contre le Ritalin

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cgelinas
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Ils dénoncent la surmédicamentation des enfants québécois ayant reçu un diagnostic de TDAH

Près d’une cinquantaine de médecins «sonnent l’alarme» et dénoncent le recours trop facile aux médicaments pour traiter des symptômes s’apparentant au trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) chez les jeunes au Québec, où la consommation de psychostimulants, comme le Ritalin, est trois fois plus élevée que dans le reste du Canada.

Dans une lettre ouverte sans précédent, 48 experts, dont 45 pédiatres, appellent à un «examen de conscience» de «toute la société qui se retourne trop facilement vers une pilule pour traiter tous les maux», une première.

Les signataires, dont le Dr Gilles Julien du Centre de pédiatrie sociale à Montréal, rappellent que les dernières statistiques sur l’utilisation de médicaments pour le TDAH chez les moins de 25 ans mettent en lumière une «troublante différence» si on la compare au reste du Canada.

«Pas de bon sens»

«Ça n’a pas de bon sens», laisse tomber le pédiatre Pierre-C. Poulin, l’un des coauteurs de la lettre, qui compte plus de 35 années d’expérience auprès des enfants.

Le Dr Poulin précise qu’il ne remet pas en question l’existence du TDAH. Le recours à la médication peut être pertinent et efficace dans certains cas, dit-il.

Mais il se questionne sur le «trop grand nombre de cas » qu’il voit défiler quotidiennement dans son bureau. « C’est comme si le niveau de patience ou de tolérance envers les enfants turbulents n’est plus le même», laisse-t-il tomber.

Certains parents «mettent de la pression» pour que leurs enfants prennent des médicaments, allant même jusqu’à se fâcher si cette demande est refusée, raconte-t-il.

Le réseau de la santé contribue aussi au phénomène, ajoute le Dr Falardeau, pédiatre à Québec depuis maintenant 43 ans et coauteur de la lettre. «Quand je réfère un enfant au CLSC, je me fais dire : “Donnez-lui des médicaments et, si ça ne marche pas, on s’en occupera”», lance-t-il.

Faux diagnostics

Le Dr Falardeau, dont 90 % des patients sont des enfants qui ont reçu des diagnostics de TDAH, estime aussi qu’il y a tout simplement trop de faux diagnostics. «Les chiffres sont aberrants, ça n’a pas d’allure. Il faut faire quelque chose», lance-t-il.

Plusieurs enfants souffrent plutôt de troubles de l’opposition ou d’anxiété, lesquels causent les mêmes symptômes que ceux reliés au TDAH, affirme-t-il.

«Le vrai problème, c’est qu’on n’est pas équipé comme société pour s’occuper de l’anxiété des enfants, qui donne les mêmes symptômes que le TDAH. Alors, on voit du TDAH partout et on prescrit des médicaments. Parce qu’on n’a pas d’autres solutions», affirme-t-il.

Dans le réseau public, le temps d’attente pour consulter un psychologue ou suivre une thérapie peut être de plusieurs mois, souligne le Dr Falardeau.

Il est temps de lancer une grande réflexion sur ces enjeux, afin d’inciter le gouvernement à mettre en place des services qui permettraient d’offrir d’autres remèdes que la pilule aux petits Québécois, ajoute le docteur en neurosciences Joël Monzée.

Taux de prévalence de l’usage de médicaments spécifiques au TDAH chez les 25 ans et moins

Québec : 6,44 %
Canada (sans le Québec) : 2,39 %

Par tranche d’âge

► 6-9 ans

Québec : 3,98 %
Canada (sans le Québec) : 1,71 %

► 10-12 ans

Québec : 13,97 %
Canada (sans le Québec) : 5,08 %

► 13-17 ans

Québec : 14,5 %
Canada (sans le Québec) : 4,3 %

Source : Institut national d’excellence en santé et en services sociaux


Source: Journal de Québec
Fichiers joints
Le Dr Guy Falardeau, photographié hier à son bureau de Québec, est pédiatre depuis 43 ans. Environ 90 % de ses patients sont des enfants qui ont reçu des diagnostics de TDAH.
Le Dr Guy Falardeau, photographié hier à son bureau de Québec, est pédiatre depuis 43 ans. Environ 90 % de ses patients sont des enfants qui ont reçu des diagnostics de TDAH.
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Claude Gélinas, Éditeur
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cgelinas
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TDAH et médicaments: sommes nous allés trop loin?

Les dernières études disponibles ont montré que l’incidence du TDAH (Trouble déficitaire d’attention/hyperactivité) et la consommation des médicaments en découlant ont fait un bond dans les dernières années auprès des jeunes 0-18 ans. On pourrait dire la même chose de l’incidence du trouble anxieux et de l’utilisation des anti-dépresseurs pour les traiter. Nous soussignés, pédiatres et autres professionnels concernés, demandons qu’une remise en question soit faite chez les médecins prescripteurs (médecins de famille, pédiatres, psychiatres), mais aussi chez le corps enseignant, les parents, les psychologues ayant à évaluer ces enfants, le gouvernement qui doit dispenser les services et toute la société qui se retourne trop facilement vers une pilule pour traiter tous les maux.

Les données de l’INESSS

L’Institut national d’excellence en santé et service sociaux (INESSS) a publié en septembre 2017 trois rapports sur le TDAH chez les 0-25 ans. L’un des rapports porte sur la prévalence de l’usage des médicaments à partir des données du régime public d’assurance médicament (RPAM) et des données de la RAMQ (1) . Un autre porte sur la prévalence de l’usage des médicaments à partir des données de l’IMS (2), donc provenant autant du régime public que des régimes privés d’assurance, et on a pu le comparer au reste du Canada. Enfin le troisième porte sur l’utilisation des services psychosociaux chez les enfants avec TDAH à partir de différentes bases de données du MSSS et d’entrevues avec des représentants de groupes cibles (3).

Les résultats des travaux de l’INESSS devraient nous amener à faire un sérieux examen de conscience sur l’utilisation des psychostimulants chez les enfants du Québec.

Le tableau suivant démontre l’augmentation de prescriptions de médicaments pour le TDAH, par groupe d’âge, entre 2006-07 et 2014-15 chez les enfants dont les médicaments sont assurés par le régime public d’assurance médicaments (RAMQ). Il s’agit du pourcentage d’enfants, adolescents ou jeunes adultes qui ont reçu au moins 1 prescription de médicaments pour le TDAH pendant la période visée.

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 	2006-2007	2012-2013	2013-2014	2014-2015
Total	2,7	4,9	5,3	5,8
0-5	0,8	0,9	0,9	1,0
6-9	7,7	10,3	10,4	10,7
10-12	8,3	13,1	13,6	14,0
13-17	3,4	8,2	9,1	9,9
18-25	0,4	2,1	2,6	3,2
Par ailleurs, les données de l’INESSS ont permis d’évaluer la prévalence d’utilisation des médicaments chez tous les enfants québécois quelque soit la couverture d’assurance-médicament et de faire une comparaison avec le reste du Canada.

Cette étude a démontré que les Québécois utilisaient beaucoup plus les médicaments pour le TDAH que le reste du Canada. En 2014-15, la prévalence était de 6,44% au Québec, 3,26% au Canada et 2,39% au Canada sans le Québec

Voici la prévalence par groupe d’âge (en pourcentage):

Code : Tout sélectionner

 	6-9 ans	10-12 ans	13-17 ans	18-25 ans
Québec	3,98	13,97	14,5	5,36
Canada	2,21	6,97	6,45	3,11
Canada sans Qc	1,71	5,08	4,3	2,48
L’INESSS avait aussi publié une trajectoire pour les enfants présentant un TDAH, faisant une place plus grande pour l’intervention psychosociale, le support aux parents, et aux enseignants (4). Force est de constater que cette recommandation n’a pas reçu l’accueil nécessaire pour favoriser l’intervention globale via les services sociaux. Seuls les parents disposant d’une marge de manœuvre financière suffisante peuvent aller chercher de l’aide via les services psychothérapeutiques offerts dans des cliniques privées.

Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire

Ces données datent de 2014-2015. Rien n’indique que la situation ait changé. Au contraire tout laisse croire que la tendance à l’augmentation persiste. Une étude récente de l’Institut de la statistique du Québec (5) a démontré que le nombre d’élèves du secondaire ayant un niveau élevé de détresse psychologique est passé de 21% en 2010-11 à 29% en 2016-17. Et la proportion d’adolescents du niveau secondaire prétendant avoir un TDAH confirmé par un médecin ou un spécialiste de la santé est lui passé de 13 à 23% (27.4% chez les garçons). Du côté des troubles anxieux, ce sont maintenant 17% des jeunes qui sont touchés (22,9% des filles) contre 9% il y a 6 ans. Ces données sont cohérentes avec l’expérience clinique.

Conclusion

Les données fournies par ces rapports sur l’utilisation des médicaments pour le TDAH chez les 0-25 ans sont troublantes. L’utilisation est plus élevée que la fréquence attendue de TDAH (5-10%) et plus élevée que dans le reste du Canada. On doit donc chercher des explications spécifiques au Québec.

Pourtant, même s’il a été clairement démontré que le traitement médicamenteux est efficace à court terme, il reste que ce n’est pas nécessairement le cas à long terme. Les données de l’étude intitulée Multimodal Treatment of Attention Deficit Hyperactivity (6) Disorder Study, appelée étude MTA, qui a évalué un traitement multimodal combinant un médicament et une approche comportementale, ont remis en question leur efficacité à long terme, mais ont aussi émis des réserves sur l’effet négatif potentiel sur la croissance.

Les critères de diagnostic du TDAH (même si on peut les critiquer) sont pourtant les même dans le reste du Canada. Les questionnaires souvent utilisés (Conners) sont identiques. Les jeunes du reste du Canada jouent aux mêmes jeux vidéos. Il y a donc des facteurs spécifiques au Québec qui expliquent cette troublante différence dans l’utilisation des médicaments pour le TDAH.

Nous demandons impérativement à tous ceux concernés, et au fond n’est-ce pas toute la société qui est concernée, de faire un sérieux examen de conscience et de se questionner pour savoir pourquoi tant de jeunes présentent des symptômes d’inattention, d’hyperactivité, d’impulsivité et d’anxiété, au point d’être traités avec des médicaments psychotropes aussi souvent.

Et nous avons signé :
  1. Pierre-C. Poulin, pédiatre, St-Georges
  2. Joël Monzée, docteur en neurosciences, Lac Masson
  3. Guy Falardeau, pédiatre, Québec
  4. Valérie Labbé, pédiatre, Lévis
  5. Catherine Déry, pédiatre, St-Georges
  6. Louise Gagné, pédiatre, Thetford
  7. Marie-Josée Lemieux-Roy, pédiatre, St-Georges
  8. Marie-Ève Marcotte, pédiatre, St-Georges
  9. Camille Ouellet, pédiatre, Lévis
  10. France de Villers, pédiatre, St-Jérôme
  11. Dominique Desmarais, pédiatre, St-Jérôme
  12. Maria Penazola, pédiatre, St-Jérôme
  13. Sophie Germain, pédiatre, St-Jérôme
  14. Jacinthe Lavigueur, pédiatre, St-Jérôme
  15. Guy Parizeault, pédiatre, Chicoutimi
  16. Yohann Couture, pédiatre, Gatineau
  17. Henriette Fortin, pédiatre, Gatineau
  18. Raphaëlle Chrétien, pédiatre, Chicoutimi
  19. Mathieu Desmeules, pédiatre, Chicoutimi
  20. Sarah Lavoir, pédiatre, Chicoutimi
  21. Jean-Benoît Bouchard, pédiatre, Chicoutimi
  22. Francis Livernoche, pédiatre, Sherbrooke
  23. Éric Lavoie pédiatre, Sherbrooke
  24. Frédéric Dallaire, cardiologue pédiatre, Sherbrooke
  25. Fanny Lacelle-Webster, pédiatre du développement, Sherbrooke
  26. Émilie Riou, pédiatre neurologue, Sherbrooke
  27. Caroline Langlais, pédiatre, Sherbrooke
  28. Caroline Pesant, pédiatre, Sherbrooke
  29. Arnaud Gagneur, pédiatre, Sherbrooke
  30. Marie-Christine Brault, professeur de sociologie, Chicoutimi
  31. Jean-Philippe Vaillancourt, neuropsychologue, Terrebonne
  32. Marie-Christine Hendricks, pédiatre, Lévis
  33. Jessica Plante, pédiatre, Lévis
  34. Céline Bélanger, pédiatre, Lévis
  35. Thérèse Côté-Boileau, chef du département de pédiatrie, Sherbrooke
  36. Josée Quesnel, pédiatre, Sherbrooke
  37. Jean-Sébastien Tremblay-Roy, pédiatre intensiviste, Sherbrooke
  38. Ann Graillon, pédiatre du développement, Sherbrooke
  39. Caroline Beaudry, pédiatre, Shawinigan
  40. Marcel Milot, pédiatre, Chicoutimi
  41. Charles Morin, pédiatre, Chicoutimi
  42. François Dumas, pédiatre, Québec
  43. Gilles Julien, pédiatre, Centre de pédiatrie sociale, Montréal
  44. Marie-Céline Caumartin, pédiatre, Trois-Rivières
  45. Mylène Rheault, pédiatre, Lévis
  46. Catherine Grenier-Cliche, pédiatre, Chicoutimi
  47. Noémie Lepage-Côté, pédiatre, Québec
  48. Jean-Paul Praud, pédiatre pneumologue, Sherbrooke
Références
  1. INESSS septembre 2017. Portrait de l’usage des médicaments spécifiques au trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) chez les Québécois de 25 ans et moins.
  2. INESSS septembre 2017. Prévalence de l’usage des médicaments spécifiques au trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) chez les Canadiens de 25 ans et moins.
  3. INESS septembre 2017. Portrait des services psychosociaux utilisés dans le traitement du trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) chez les Québécois de 25 ans et moins.
  4. INESSS mars 2018. Trajectoire optimale de services pour les enfants, adolescents et jeunes adultes ayant un trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ou des difficultés apparentées.
  5. Institut de la statistique du Québec. 2018. Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2016-2017. Tome 2 L’adaptation sociale et la santé mentale des jeunes.
  6. The Journal of Child Psychology and Psychiatry. Young adult outcomes in the follow-up of the multimodal treatment study of attention-deficit/hyperactivity disorder : symptom persistence, source discrepancy, and height suppression. 2017

Source: Journal de Québec
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

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