Un autre visage de Jean Garon?

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cgelinas
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Récemment, un billet écrit par Roméo Bouchard a été publié dans La vie agricole et ça semble fort intéressant.

Peut-être que Jean Garon préfère que nous ne sachions pas tout de ses interventions dans le domaine agricole, au Québec...

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L’autre visage de Jean Garon

mercredi, 09 juin 2010 14:56

Dernièrement, l’édition de La Terre de Chez Nous rapportait les propos – sans doute sollicités – de Jean Garon, ex-ministre de l’agriculture dans le gouvernement de René Lévesque, dans lesquels il défend le monopole syndical de l’UPA, ridiculise l’Union paysanne et critique le pluralisme dans le syndicalisme ouvrier.
On comprend que l’UPA veuille profiter de quelques phrases incendiaires de Jean Garon dans le débat actuel sur la nouvelle politique agricole. Mais à force de répéter qu’il fut le ministre qui a le plus marqué l’agriculture – comprenez : qui a le plus fait plaisir aux agriculteurs on finit par oublier que nous payons encore collectivement le prix de plusieurs de ses réformes spectaculaires mais souvent à courte vue.

On lui doit bien sûr le zonage agricole, qui a mis un frein à la spéculation immobilière sur les terres agricoles, mais ce qu’on a oublié, c’est qu’il a imposé une gestion hypercentralisée du territoire agricole et réduit presque à néant le pouvoir d’aménagement des nouvelles MRC que son collègue ministre Jacques Léonard essayait de mettre en place au même moment. En fait, il a cédé à l’UPA un droit de veto prioritaire sur 90 % du territoire que les MRC ont mission d’aménager, avec comme résultat que l’accès au territoire agricole est aujourd’hui réservé en pratique aux fermes industrielles et que des centaines de villages en dépeuplement sont condamnés à voir leurs terres retourner en friches sans pouvoir les utiliser. C’est précisément ce que propose de corriger le rapport Ouimet.

Les agriculteurs l’aiment bien, Jean Garon, parce qu’il les a remis sur la carte et leur a obtenu des programmes de soutien sans précédent pour moderniser leurs fermes, comme l’aide aux travaux mécaniques d’égouttement, le drainage souterrain, l’épandage de chaux, les aboiteaux sur les battures du fleuve, le redressement des cours d’eau, etc. Mais aujourd’hui, on constate que la plupart de ces travaux ont détruit les protections naturelles des cours d’eau, les boisés, les haies et les milieux humides, et il faut payer de nouveau pour remettre la nature en place.

Il voulait augmenter le taux d’autosuffisance alimentaire du Québec à 70 % : aujourd’hui, avec nos belles fermes modernes, ce taux ne dépasse guère 30 %. Et n’en déplaise à M. Garon, c’est l’Union paysanne qui préconise depuis dix ans le retour à la souveraineté alimentaire et à l’agriculture de proximité au Québec et dans chaque région, dans la foulée des revendications élaborées par Via Campesina pour contrer les accords de libre échange. À l’époque, l’UPA ne jurait que par la conquête des marchés mondiaux, et encore aujourd’hui, ce que l’UPA défend, ce n’est pas la souveraineté alimentaire mais son monopole sur la mise en marché.

Dans le contexte où les agriculteurs conventionnels sont captifs d’un syndicat unique, le succès de l’Union paysanne ne réside pas d’abord dans le nombre fort respectable d’agriculteurs qu’elle a compté parmi ses membres mais dans la prise de conscience qu’elle a provoqué dans la population, avec si peu de moyens, concernant les effets pervers d’une agriculture et d’une alimentation industrielles et la nécessité de restaurer une agriculture locale et écologique. Il suffit de lire les 700 mémoires présentés à la commission Pronovost pour s’en convaincre.

Quant on lit, dans les propos de Jean Garon, le mépris qu’il exprime à l’égard des grandes centrales syndicales et de la liberté d’association et de pensée, on se demande s’il ne rêve pas d’un régime fasciste à pensée et à parti uniques. Le moins qu’on puisse dire est qu’il se distingue davantage par ses fanfaronnades que par son esprit démocratique.

Est-ce ce qui plait à l’UPA ? L’UPA rend-elle vraiment service aux agriculteurs en s’accrochant ainsi au passé plutôt qu’en les aidant à profiter des perspectives d’avenir et des programmes que leur offre la réforme pour faire le virage vers une agriculture plus ouverte, plus proche des besoins actuels, et par le fait même, plus efficace et plus appréciée ?

Roméo Bouchard
Saint-Germain-de-Kamouraska
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

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