Gouvernement: Exigences variables et inégales

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cgelinas
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Il semble plus facile de chercher des poux aux institutions publiques ou syndicales que de faire le ménage dans les entreprises privées. Sous prétexte que les premières vivent en tout ou en partie de nos impôts, on leur exige une transparence et une éthique à toute épreuve pendant qu’on tolère les pratiques occultes des secondes qui profitent largement de crédits ou d’exemptions fiscales.

Héloïse Archambault relatait, dans l’édition d’aujourd’hui, le cas d’un ancien DGA du CHUM qui avait été engagé comme consultant par son ancien employeur à un taux horaire de 125$ de l’heure. Il a ainsi gagné 300 000$ en deux ans. Sarah-Maude Lefebvre nous informait, dans l’édition d’hier, de l’allocation automobile versée à des sous-ministres ou à des dirigeants de société d’État qui dépassent les 7000$ annuellement même s’ils n’ont pas à se déplacer. Je ne dis pas qu’il n’y a pas lieu de s’interroger et de rechercher plus de rigueur, mais il n’en demeure pas moins que ces pratiques sont largement empruntées à celles du secteur privé.

J’ai souvenir d’un débat lors d’une réunion du conseil d’administration de la caisse d’économie auquel je siégeais. Il portait nommément sur les nouvelles règles d’allocation automobile pour le directeur général de la caisse. Desjardins avait révisé sa politique et nous devions nous prononcer sur une allocation qui avoisinerait les 9000$ malgré le peu déplacements reliés à sa fonction. Malgré mes arguments pour rembourser sur présentation de réclamation reflétant le kilométrage réel, ce qui aurait été plus économique pour la caisse, la majorité suivit le président du conseil d’administration qui argüait que nous n’avions pas vraiment le choix et que nous devions adopter la politique du Mouvement Desjardins. Les prétentions étaient à l’effet que Desjardins voulait, pour ses directeurs généraux, des voitures qui reflètent leur fonction distinguée. Au diable l’autonomie des caisses après le tsunami du siège social!

Il serait intéressant d’avoir une meilleure connaissance des privilèges et des avantages octroyés dans le secteur privé pour attirer des têtes de haut calibre, car à l’évidence c’est à ce propos que nous entretenaient les journalistes du Journal. Nous pourrions mieux juger si nos institutions publiques en font trop pour recruter ou si ce n’est que le reflet de la concurrence entre chasseurs de tête.

Pour ajouter à mon titillement, Francis Vaille ramène le discours sur l’obligation des syndicats à rendre publics leurs états financiers. Le chroniqueur est toutefois obligé de constater qu’il est plutôt facile de les obtenir contrairement aux états financiers de l’entreprise pour laquelle il travaille. Il faut se rappeler que, lors de la dernière négociation du syndicat des journalistes de La Presse, ces derniers ont fait face aux refus de l’éditeur Crevier d’ouvrir les livres de Gesca.

Je demeure toutefois perplexe devant ses arguties de transparence qui s’appuient sur le milliard de dollars de cotisations syndicales versées par les travailleurs et l’incertitude de leur capacité de comprendre l’utilisation qui est faite de ces sommes. Il pousse l’audace de faire croire, qu’à cause des crédits fiscaux rattachés aux cotisations, la connaissance des états financiers n’est pas seulement l’apanage des membres, mais elle est aussi d’intérêt public. Pourtant il reconnaît que les syndicats sont des organismes privés.

Plus particulièrement, le chroniqueur semble en avoir contre certaines opérations syndicales et se demande si celles-ci ont l’accord de tous les membres. En demandons-nous autant à nos gouvernements élus par une minorité d’avoir l’aval de toute la population pour chacune de leurs opérations, considérant que nous versons des dizaines de milliards en impôt? Devrait-on s’offusquer des ententes commerciales secrètes conclues par nos gouvernements? La ligne éditoriale de son journal devrait-elle être arrêtée en dehors de ses murs, si l’on prend en considération les exemptions fiscales de son employeur? Pourquoi les exigences seraient plus grandes pour les organisations syndicales que pour les gouvernements ou les entreprises?

Je songe également à toutes ces critiques qui ont été faites à l’égard de l’industrie du taxi dans le débat sur Uber. À entendre les détracteurs, la plupart des taxis étaient tous des véhicules sales et mal entretenus avec des chauffeurs grossiers. Le Journal nous amène cependant un tout autre regard malgré une augmentation du nombre de plaintes enregistrées dans l’industrie montréalaise du taxi. En se basant sur le nombre de plaintes enregistrées au premier semestre, celles-ci devraient s’élever à près de 900 pour l’année sur un total de 25 millions de déplacements, soit un taux de 0,0036% d’insatisfaction. De tels chiffres, dans d’autres industries, seraient associés à la qualité totale ou à une prestigieuse qualité « ISO ».

Je laisse à chacun le souhait de supputer ses hypothèses sur le traitement sévère de nos institutions collectives et de la relative tolérance à l’égard des institutions privées, j’ose toutefois espérer que le citoyen puisse disposer de suffisamment d’informations pour ainsi lui permettre d’aller au-delà de ses simples préjugés.


Source: Journal de Montréal
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

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