Projet de loi C-29: Les consommateurs à la merci des banques

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cgelinas
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La modification de la Loi sur les banques n’est pas une bonne nouvelle pour les consommateurs québécois, selon les experts interrogés par Protégez-Vous.

Le projet de loi C-29 adopté le mardi 6 décembre à la Chambre des communes pourrait affaiblir la Loi sur la protection du consommateur.

Selon le gouvernement Trudeau, les modifications à la Loi sur les banques visent à renforcer le Code fédéral de protection des consommateurs de services bancaires.Dans les faits, les nouvelles dispositions de cette loi «mammouth» pourraient faire beaucoup de tort aux consommateurs, estime Me Alexandre Plourde, avocat chez Option Consommateurs. «Le projet de loi contient une clause tout à fait explicite affirmant que les dispositions de la Loi sur les banques qui concernent la protection des consommateurs sont prépondérantes sur les dispositions provinciales», explique-t-il.

Autrement dit, la Loi sur la protection du consommateur (LPC) du Québec ne pourrait plus être invoquée par ceux qui ne seraient pas satisfaits des services de leur institution bancaire, croit l'avocat. Or, rappelle Jacques St-Amant, chargé de cours en sciences juridiques à l’UQAM, la LPC est bien plus complète et protège davantage les consommateurs que l’ensemble des nouvelles dispositions de la loi fédérale C-29. À noter que cette loi fédérale ne s'applique pas au Mouvement Desjardins, régi par la Loi sur les coopératives de services financiers du Québec, rappelle Me Yannick Labelle, avocate et analyste en pratiques commerciales et protection du consommateur à l’Union des consommateurs.

Une loi fédérale qui empiète sur la loi provinciale

Pour Me Plourde, «si la LPC ne devait plus s’appliquer aux banques, cela ouvrirait la porte à des pratiques jusqu’ici interdites au Québec. Les banques pourraient par exemple décider d’appliquer toutes sortes de nouveaux frais aux consommateurs. C’est à craindre, car le nouveau texte de loi semble beaucoup plus permissif en matière d’imposition des frais.»

Les contrats bancaires pourraient également contenir «des clauses inéquitables», insiste Jacques St-Amant. «Une banque pourra ainsi inclure une clause la dédouanant de toute responsabilité, même en cas de négligence, poursuit-il. Dans le contexte de la LPC, il est impossible d’inclure une telle clause. Par contre, ce serait parfaitement valide en vertu de la législation fédérale.» Avec pour effet qu’un consommateur «ne pourra plus poursuivre sa banque si elle lui a causé un préjudice, même si celle-ci reconnaît avoir été négligente. Il faut quand même le faire!», conclut Jacques St-Amant.

Publicités trompeuses moins sanctionnées?

Autre crainte des associations de consommateurs: une recrudescence de publicités trompeuses et de fausses représentations. «Une représentation qui était trompeuse en vertu de la LPC le sera-t-elle également en vertu de la nouvelle Loi sur les banques?», s’interroge Me Plourde. Rien n’est moins sûr. Et si ce n’est pas le cas, cela pourrait ouvrir la porte à certaines pratiques déloyales.

Jacques St-Amant rappelle par ailleurs que l’article 11.1 de la LPC interdit aux établissements bancaires d’inclure une clause empêchant les consommateurs d’intenter des recours collectifs. «Or, il n’y a pas de dispositif comparable dans le projet de loi C-29. Nos banques pourraient donc se prémunir contre la tentation des consommateurs d’intenter un recours collectif contre elles.»

«Ces dernières années, les rebuffades par les tribunaux et, pis encore, les condamnations à plusieurs millions de dollars de dommages à l’issue de recours collectifs représentent pour les banques de cinglants camouflets, rappelle Me Yannick Labelle. Les banques se réjouiront donc de ce qu’elles considéreront comme la possible élimination des risques que représentent les recours collectifs.» L'Union des consommateurs a longuement réagi sur son site à cette modification de la Loi sur les banques.

Mais, tôt ou tard, «des gens vous vouloir contester la validité de ces nouvelles prétentions fédérales devant les tribunaux. Nous allons donc au-devant de 10 ou 15 ans d’incertitude juridique en attendant de savoir quelle loi a préséance. Et, pendant ce temps-là, les banques feront ce qu’elles veulent», déplore Jacques St-Amant.

Les banquiers aux anges… mais pas les notaires!

Dans une allocution prononcée devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes le 22 novembre dernier, le président de l’Association des banquiers canadiens (ABC), Terry Campbell, s’est réjoui des modifications introduites dans le projet de loi C-29 en ces termes: «L’ABC et ses membres appuient depuis toujours l’existence d’un régime de réglementation fédéral pour la protection des consommateurs. Au Canada, les consommateurs bénéficient d’un cadre solide de protection en matière de services financiers. Toutefois, le régime proposé dans le projet de loi C-29 représente une mesure importante pour renforcer cette protection grâce à des règlements clairs, simples et cohérents, qui s’appliqueront à l’ensemble du pays.»

De leur côté, les notaires ont vivement réagi à l’adoption du projet de loi, estimant que les consommateurs québécois «ont beaucoup à perdre». Dans une lettre ouverte, le président de la Chambre des notaires, Gérard Guay, estime qu’Ottawa devrait «privilégier la cohabitation des règles fédérales et provinciales en matière de protection du consommateur, et ce, afin de s’assurer que la règle la plus favorable s’applique au citoyen».


Source: Protégez-vous
Claude Gélinas, Éditeur
chaudiere.ca

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